Huit mains pour un roman
La première personne que Tensia remarqua en pénétrant dans le hall des douanes
à l'aéroport de Mexico, ce fut le gros homme qui avait eu quelque problème pour
s'alimenter dans l'avion.
Il gardait de l'aventure quelques tâches disséminées çà et là sur la blancheur
immaculée de son costume.
Sa compagne, une grande femme brune, lui en faisait le reproche à voix haute :
"tu as vu, comment pourras-tu assister au diner de Mantès dans
cet état là?"
"ne t'inquiète pas, dès que j'aurai récupéré ma valise, je me changerai
dans les toilettes"
"décidément, tu es un porc!"
"merci du compliment, ma chère, mais si nous en sommes aux petits
noms d'animaux, Morue me semble approprié en ce qui te concerne"
"comment oses-tu ?"
"n'oublie pas que je t'ai ramassée sur le trottoir et que je pourrais
te repousser dans le caniveau."
"tu n'es qu'un mufle!"
Tensia assistait à la scène, comme au théâtre, elle songea qu'ils semblaient,
en effet, tous deux, jouer quelque scène d'une très mauvaise pièce.
Elle s'éloigna avant la fin du premier acte.
En s'approchant d'un guichet, elle se sentit mal à la l'aise, quelque chose
clochait....
"Por favor, signor, où puis-je trouver un taxi?"
Le préposé lisait son journal. Un autre voyageur l'apostropha....il lui
répondit d'un ton affable.
Tensia réitéra sa question.
Elle semblait transparente. L'homme n'eut pas même un regard vers elle.
Elle interpella une hôtesse qui passait, mais la femme la bouscula et
poursuivit son chemin.
Tensia revint alors vers le couple qui se déchirait de plus belle, elle
leva la main pour les arrêter, mais....... son regard enregistra soudain
un détail auquel elle n'avait pas prêté attention tout d'abord:
Les tâches sur le costume du gros homme, çà n'était pas du
gras........C'ÉTAIT DU SANG!!!