Le loup rouge

-Dans le bois des soucis....

  Il était une fois un loup qui n'aimait pas son pelage gris!...

  Le gris est si triste! il aurait voulu être couleur vermillon, couleur de joie, couleur de feu, couleur du manteau de cette petite fille qu'il essayait en vain de dévorer depuis des siècles.

  Elle était si...sautillante, si...souriante, si...insouciante cette enfant de rouge vêtue, qu'il se sentait, à ses côtés, comme dilué dans la grisaille d'un poil gris exécré!

  Un jour, vint à passer un marchand de couleurs.

  Sa palette chatoyante fascina le loup . C'était une explosion de jaune, de rouge, de tons mordorés. Et il se disait que le chant de ces teintes si chaudes, si fondantes était un opéra vibrant et triomphant dans le théâtre grandiose d'une nature en osmose.

  Alors, il dévora le pauvre marchand, sa palette et ses couleurs, se gardant d'avaler le rouge dont il s'aspergea.

  Il devint alors une sorte de diable louveteux à la robe criarde et hurlante! Chaque fois qu'il croisait un des hôtes de la forêt, il s'enquérait de son avis sur sa nouvelle apparence et malheur à qui s'avisait de ne pas s'extasier.

  Un lapin hâbleur, un renard farceur et un saule pleureur y perdirent la vie.

  Vint un jour de pluie! Un déluge s'abattit sur le bois des soucis. Le ciel tremblait sous l'orage, aucune trace d'enfants sages ...bien à l'abri dans leur logis.

  Le loup, fier de son pelage, dansa tout le jour sous les pleurs des nuages qui, de ses folies le lavèrent, enterrant là ses chimères.

  La nature reprenait ses droits et le loup gris...le resta!